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154 LIVRE m. LA CITÉ.

complir,ii faut que le peuple soit pur: or les anciens croyaient ge purifier de toute tache physique ou morale en sautant à travers la flamme sacrée

Quand cette cérémonie préliminaire a préparé le peuple au grand acte de la fondation, Romulus creuse une petite fosse de forme circulaire. Il y jette une motte de terre qu'il a ap- portée de la ville d'Albe*. Puis chacun de ses compagnons, s' approchant à son tour, jette comme lui un peu de terre qu'il a apportée du pays d'où il vient. Ce rite est remarquable, et il nous révèle chez ces hommes une pensée qu'il importe de signaler. Avant de venir sur le Palatin, ils habitaient Albe ou quelque autre des villes voisines. Là était leur foyer : c'est là que leurs pères avaient vécu et étaient ensevelis. Or la reli- gion défendait de quitter la terre oîi le foyer avait été fixé et où les ancêtres divins reposaient. Il avait donc fallu, pour «e dégager de toute impiété, que chacun de ces hommes usât d'une fiction, et qu'il emportât avec lui, sous le symbole d'une motte de terre, le sol sacré où ses ancêtres étaient ensevelis et auquel leurs mânes étaient attachés. L'homme ne pouvait se déplacer qu'en emmenant avec lui son sol et ses aïeux. Il fallait que ce rite fût accompli pour'qu'il pût dire en montrant la place nouvelle- qu'il avait adoptée: Ceci est encore la terre de mes pères, terra patrum, patria; ici est ma patrie, car ici sont les mânes de ma famille.

La fosse où chacun avait ainsi jeté un peu de terre s'appe- lait mundus; or ce mot désignait spécialement dans l'an- cienne langue religieuse la région des mânes'. De cette même place, suivant la tradition, les âmes des morts s'échappaient trois fois par an, désireuses de revoir un moment la lumière *.

��1. Plutarqae, Romulut, li. Dion Cusiai, Fragm., 13. Ovide, Fait, IV, 831.

Peetus, T» Quadrata.

3. Plutarque, Romv,lu»,H : laXaûst tï tii fitfv tvOrov iioûvjov. Festus, éd. Mili- ter, p. 156 : mundum..,. inferiorem ejuipartwn eonsecratam diis manibus. ServiuB, ad jEn., III, 134 : aras Inferorum {vacant) mundos.

3. L'expression mundus patet désignait ces trois jours où les mânes sortaient de leurs demeures. Varron, dans Macrobe, Satum., 1, 16 : mundus quum palev, Deo- rumtristium alque inferûm quasi janua patet. Festus, éd. Millier, p. i&6: Mwndum («r <n «mno patere putabtmt.... eiautwniMnniiempore prmter hos

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