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né d'an mariage légitime dans une des familles qui la com> posaient. Car la religion de la phratrie, comme celle de la famille, ne se transmettait que par le sang. Le jeune Athénien était présenté à la phratrie par son père, qui jurait qu'il était son fils. L'admission avait lieu sous une forme religieuse. La phratrie immolait une victime et en faisait cuire la chair sur Tau tel ; tous les membres étaient présents. Refusaient - ils d'admettre le nouvel arrivant, comme ils en avaient le droit, s'ils doutaient de la légitimité de sa naissance, ils devaient enlever la chair de dessus l'autel. S'ils ne le faisaient pas, si après la cuisson ils partageaient avec le nouveau venu les chairs de la victime, le jeune homme était admis et devenait irré- vocablement membre de l'association'. Ce qui explique ces pratiques, c'est que les anciens croyaient que toute nourriture préparée sur un autel et partagée entre plusieurs personnes établissait entre elles un lien indissoluble et une union sainte qui ne cessait qu'avec la vie*.

Chaque phratrie ou curie avait un chef, curion ou phra- triarque, dont la principale fonction était de présider aux sa- crifices. Peut-être ses attributions avaient-elles été, à l'origine, plus étendues. La phratrie avait ses assemblées, ses délibéra- tions, et pouvait porter des décrets '. En elle, aussi bien que

��1. Démoslhène, in Macartatum, 13-15. tsée, de Philoct. hered., 21-22; de C'v- ronie hered., i%. — Rappelons qu'une aiioplion régulière produisait toujours les mêmes etTets que la Gliatioa légitime et qu'elle en tenait lien.

2. Celte même opinion st le principe de l'hospitalité antique. Il n'est pas de notre sujet de décrire cette curieuse institution. Disons seulement que la religion y eut une grande part. L'homme qui arait réussi à atteindre le foyer ne pouvait plus être regardé comme un étranger; il était détenu l^iirtioî (Sophocle, Trachin., 262; Euripide, Ion, 654; Eachjle, Euménides, 577; Thucydide, I, 137). Celui qui avait partagé le repas sacré était pour toujours en communauté religieuse avec son hôte; c'est pour cela qu'Évandre dit eux Troyens : Communem vooate Deum (Virgile, Enéide, VIII, 275). — Ici se Toit un exemple de ce qu'il y a toujours de sagement illogique dans l'âme humaine : la religion domestique n'est pas faite pour l'étranger; par essence, elle le repousse, mais par cela même l'étranger qui y est une fois admit est d'autant plus sacré. Dès qu'il a touché le foyer, il faut de toute nécessité qu'il eesse d'être un étranger. Le même principe qui l'écartait hier exige qu'il soit au- jourd'hui et pour toujours un membre de la fimille.

J. Sur le curto ou magitter curùe, voy. Denys, II, 64 ; Varron, De lingl. at., V, 83 ; FestUB, p. 136. Le phratriarque est mentioané dans Démosthène, in EttbuL, 33. La délibération et le vote sont décrits dans Dém., in Maoart., 83. Plusieurs i»*

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