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12) LIVRE II. LA FAMILLE.

Cette vérité admise, tout ce que les écrivains anciens nous disent de la gens devient clair. L'étroite solidarité que nous remarquions tout à l'heure entre ses membres n'a plus rien de surprenant : ils sont parents par la naissance. Le culte qu'ils pratiquent en commun n'est pas une fiction : il leur vient de leurs ancêtres. Gomme ils sont une même famille, ils ont une sépulture commune. Pour la même raison, la loi des Douze Tables les déclare aptes à hériter les uns des autres. Comme ils avaient tous, à l'origine, un même patrimoine indivis, ce fut un usage et même une nécessité que la gens entière ré- pondît de la dette d'un de ses membres, et qu'elle payât la rançon dti prisonnier ou l'amende du condamné. Toutes ces règles s'étaient établies d'elles-mêmes lorsque la gens avait encore son unité; quand elle se démembra, elles ne purent pas disparaître complètement. De l'unité antique et sainte de cette famille il resta des marques persistantes dans le sacri- fice annuel qui en rassemblait les membres épars, dans la législation qui leur reconnaissait des droits d'hérédité, dans les mœurs qui leur enjoignaient de s'entr'aider.

11 était naturel que les membres d'une même gens portassent un même nom, et c'est aussi ce qui arriva. L'usage des noms patronymiques date de cette haute antiquité et se rattache visiblement à cette vieille religion. L'unité de naissance et de eulte se marqua par l'unité de nom. Chaque gens se transmit de génération en génération le nom de l'ancêtre et le perpétua avec le même soin qu'elle perpétuait son culte. Ce que les Romains appelaient proprement nomen étsit ce nom de l'an- cêtre que tous les descendants et tous les membres de la gens devaient porter. Un jour vint où chaque branche, en se ren- dant indépendante à certains éeards, marqua son individua-

8on gentiliâ ; maia on pouTalt ttre genUlis sans (tre agnat. La loi des Douze Ta- bles donnait l'héritage, k défaut d'agnats, à ceux qui n'étaient que gentiles à l'é- gard du défunt, c'est-à-dire qui étaient de sa gens sansitre de sa branche ou de sa familia. — Nous verrons plus loin qu'il est entré dans la gen« un élément d'ordre inférieur, la clientèle : de là s'est formé un lien de droit entre la gens et le client; or, ce lien de droit s'est appelé aussi gentilitas. Par exemple, dans Cicéron, De oratore, I, 39, l'expression jus gentililaiis désigne le rapport entre la gens et lei clients. C'est ainsi que le même mot a désigné deux choses que nous ne devoni pas confondre.

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