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CHAP. X. LA GENS A ROME BT EN GRÈCE. 117

en remarque que c'est toujours un ancêtre divinisé, et que Tautel où elle porte le sacrifice est un tombeau. A Athènes les Eumolpides vénèrent Eumolpos, auteur de leur race ; le Phytalides adorent le héros Phytalos, les Butades Butés, les Busélides Busélos, les Lakiades Lakios, les Amynandrides Cécrops'. A Rome, les Claudius descendent d'un Clausus; les Caecilius honorent comme chef de leur race le héros Cseculus, les Calpurnius un Calpus, les Julius un Julus» les Clœlius un Clœlus".

Il est vrai qu'il nous est bien permis de croire que beau- coup de ces généalogies ont été imaginées après coup ; mais il faut bien avouer que cette supercherie n'aurait pas eu de motif, si ce n'avait été un usage constant chez les véritables gentes de reconnaître un ancêtre commun et de lui rendre un culte. Le mensonge cherche toujours à imiter la vérité.

D'ailleuYs la supercherie n'était pas aussi aisée à commettre qu'il nous le semble. Ce culte n'était pas une vaine formalité de parade. Une des règles les plus rigoureuses de la religion était qu'on ne devait honorer comme ancêtres que ceux dont on descendait véritablement; offrir ce culte à un étranger était une impiété grave. Si donc la gens adorait en commun un ancêtre, c'est qu'elle croyait sincèrement descendre de lui. Simuler un tombeau, contrefaire des anniversaires et des repas funèbres, c'eût été porter le mensonge dans ce qu'on avait de plus sacré, et se jouer de la religion. Une telle fiction fut possible au temps de César, quand la vieille religion des fa- milles ne touchait plus personne. Mais si l'on se reporte au temps où ces croyances étaient puissantes, on ne peut pas imaginer que plusieurs familles, s'associant dans une même fourberie, se soient dit : Nous allons feindre d'avoir un même ancêtre; nous lui érigerons un tombeau, nous lui offrirons des repas funèbres, et nos descendants l'adoreront dans toute la suite des temps. Une telle pensée ne devait pas se présenter

��1. Démosthène, in Macart., 79. Paasanias, I, 17. fnsortp<*on des Amynan

dindes, citée par Ross, p. 24.

■ 2. FmIus, V" Cœculu$, Calpwmii. Ci-~Ha.

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