Page:Froger - À genoux, 1878.djvu/193

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le passé bienheureux dans ses moindres détails :
L’église du faubourg, où, sous les grands portails,
J’attendais qu’elle vînt dans la foule, isolée ;
Et, dans le grand jardin peuplé d’arbres, l’allée
Où je l’ai vue un jour, à travers le couchant,
La musique et les fleurs, passer en me cherchant.
C’est là que je revois encore les murailles
De la maison qui la cachait dans ses entrailles,
La rue aux noirs pavés pleine d’estaminets,
Et le petit bazar en face où je venais,
Et d’où parfois, rêveur, je la voyais sourire.
C’est là que je revois, avec plus de délire,
Ces longs soirs du dernier été qui fut si beau,
Où le soleil, comme un prodigieux flambeau,
S’éteignait dans les eaux du lac parmi les branches,
Et toutes les splendeurs, toutes les formes blanches
Des cygnes s’endormant sur les flots adoucis,
Et l’arbre sous lequel nous nous sommes assis ;
Et puis, plus près de nous encor, cette soirée
Où nous avons, autour de la table éclairée
Par la lampe, parmi les oiseaux et les fleurs,
Longtemps causé de nos amours et de nos pleurs.

C’est dans le plus profond de tes beaux yeux, chérie,
Que je revois, comme une éternelle patrie