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GUIDE DU BON SENS

cuper de la vie chère. Il n’y a pas de vie chère pour l’avare : quel que soit le prix des choses, il restreint à ce point ses besoins qu’il n’achète jamais rien, à bas prix, pas plus qu’à haut prix.

POLYDOXE. — En sorte que le remède à la vie chère pourrait être l’avarice ? Les avares ne sont donc pas si déraisonnables…

EUDOXE. — ils sont déraisonnables d’attacher du prix à ce qui n’en a pas, à la monnaie d’échange, à l’or par exemple, représentant le prix des choses, et non à la chose en soi que ce prix représente. Comment le bon sens ne condamnerait-il pas l’avare qui meurt de privations sur son tas d’or et faute de soins ?

POLYDOXE. — Cet avare est cependant logique avec lui-même, puisque c’est l’or qu’il préfère, qu’il le préfère à la vie, et que, pour lui, vivre en dépensant l’or qu’il peut avoir, ce n’est pas vivre.

EUDOXE. — La logique n’est pas nécessairement d’accord avec le bon sens. Mais on parle toujours d’or à propos des avares ; c’est fausser l’idée que l’on doit se faire de l’avarice en lui prêtant un semblant de prétexte ou d’excuse : cet or brillant et chatoyant a de quoi plaire aux yeux comme un bijou, et bien que la mode des bijoux d’or soit un peu passée, on peut se rappeler qu’ils ont été recherchés par