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GUIDE DU BON SENS

Une autre version de la chanson de Monsieur de la Palisse qui, affirment les exégètes, serait à l’origine de tous les couplets dont elle s’enrichit par la suite, est encore, sur ce point essentiel, plus nette et directe, et précise excellemment le sort de son héros :

Hélas ! s’il n’était pas mort
Il serait encore en vie.

On ne saurait mieux dire, et voilà qui coupe court à toutes les confusions détestables où nous pataugeons : c’est tout l’un ou tout l’autre, et la vie et la mort n’ont pas à se chevaucher l’une l’autre, la mort ne prendra pas la vie en croupe.

Chose étrange ! une constatation si raisonnable a-t-elle paru trop raisonnable ? Les exégètes dont nous parlions n’ont pas consenti à admettre qu’elle eût été faite de bonne foi ; et l’on s’est avisé d’une interprétation non moins ingénieuse que celle qui, dans les stances célèbres de Malherbe, soutient que la fille de du Périer s’appelait Rosette et qu’au lieu de « Rose, elle a vécu… » c’est « Rosette a vécu ce que vivent les roses » qu’avait écrit le poète, trahi de la façon la plus favorable, mais trahi tout de même par son imprimeur.

Et, pareillement, la chanson disait primitivement que, si la Palisse n’était pas mort,

Il ferait encore envie…