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Aussi raconte-t-on qu’une femme sauvage,
Pendant que les canots s’éloignaient du rivage,
Avait vu, dans le pli des grands brouillards douteux,
Un long fantôme blanc qui fuyait devant eux.

Quoi qu’il en soit, après ce hardi pilotage,
Qui les avaient conduits jusqu’au pied du portage,
Nos fugitifs étaient à l’abri du péril.
Attirés en amont par les coups de fusil
Que le vaillant Cadieux répétait à distance,
Les Iroquois avaient manqué de surveillance ;
Et, désertant leur camp sur la rive embusqué,
Dans le gouffre écumeux n’avaient rien remarqué.
Les braves voyageurs étaient sauvés. Sans doute
Que le pauvre Cadieux, égaré sous la voûte
Des bois épais, longtemps dut errer au hasard,
De ravins en ravins traqué comme un renard ;
Et sans doute qu’aussi, de dévoûment prodigue,
Bien qu’épuisé de faim, de soif et de fatigue,
Longtemps, à la façon de nos rudes chasseurs,
Il avait harcelé ses lâches agresseurs,
Qui de dépit enfin battirent en retraite ;