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pour désigner le chef de l’État : n’est-il pas évident qu’elle amènerait chaque fois une crise si violente que la société elle-même serait compromise ? L’attente seule de cette crise arrêterait longtemps d’avance toutes les spéculations industrielles et commerciales, qui ne peuvent se développer que par la confiance dans l’ordre public ; des milliers d’individus qui n’ont pour vivre que le travail de chaque jour, se trouveraient ainsi, manquant de pain, à la disposition des partis, qui, nous ne le savons que trop bien par notre propre histoire, ne reculent pas devant l’emploi de pareils auxiliaires. Supposons que ces dangers soient surmontés, que, par de savantes combinaisons, l’élection du chef de l’État n’excite pas le plus léger désordre, et voyons quelles seraient les conséquences d’un tel système pour la prospérité publique. Les gouvernants électifs, sortis du sein de la nation pour y rentrer bientôt, ont d’abord une éducation à faire ; elle a lieu aux dépens du pays : ils appartiennent nécessairement à l’un des systèmes politiques, économiques et industriels qui partagent la société ; ils sont aussi les représentants d’intérêts spéciaux et locaux ; ils ont presque toujours eux-mêmes des vues et des intérêts particuliers qu’ils doivent chercher à faire prévaloir : aussi ne peut-il y avoir aucun esprit de suite dans la marche de l’administration ; ce n’est qu’une série d’essais incomplets qui n’ont jamais le temps de produire le bien qu’ils annoncent ; la prospérité publique est entravée, soit par des obstacles présents, soit par la crainte d’obstacles à venir ; et le pouvoir lui-même, faible parce qu’il est précaire, manque de la force nécessaire pour exécuter ce qu’il a conçu.

Avec un chef électif, la France, qui est appelée à jouer au dehors un rôle important, perdrait sa prépon-