Page:Foucart - Éléments de droit public et administratif, 1855.djvu/42

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

inaliénable ; mais les hommes ont réfléchi on jour qu’il y aurait quelques avantages pour eux à vivre en société ; ils ont alors fait une convention synallagmatique, par suite de laquelle ils ont consenti à restreindre l’exercice de leurs droits primitifs, pour recevoir en échange la sûreté et les autres avantages sociaux. De telle sorte que l’état de société ne serait que le résultat de la volonté des hommes ; une de ces institutions du droit positif, qui pourrait exister ou ne pas exister ; un contrat dont les parties contractantes auraient à chaque instant, le droit de se désister.

Cette théorie est fausse dans sa base et dangereuse dans ses résultats. Fausse dans sa base, car elle suppose tous les hommes placés dans un état de guerre les uns vis-à-vis des autres, état de guerre essentiellement contraire à la conservation et au développement du genre humain, qui sont certainement dans les vues du Créateur. Elle admet un état chimérique dont nulle tradition historique ne fait mention, une convention impossible à former et plus impossible encore à exécuter ; car, le droit de chacun étant déclaré inaliénable, le contrat ne liera jamais personne, et chaque contractant pourra s’en affranchir quand il le jugera convenable.

Elle est dangereuse dans ses conséquences, car, malgré tous les sophismes, les hommes sentent fort bien que l’état de société peut seul leur donne la tranquillité et le bien-être. Or ceux qui ont quelque chose à conserver s’entendront nécessairement pour maintenir dans l’obéissance ceux qui, n’étant pas satisfaits de leur part dans les avantages de la société, voudront s’emparer du pouvoir. La société alors sera le théâtre d’une lutte continuelle dans laquelle il n’y aurait d’autre droit que la force, d’autres règle de gouvernement que la raison