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Si le décret, quel qu’il soit, est attaqué pour excès de pouvoir, il y a là matière à un recours par la voie contentieuse, puisque le droit qui protège chaque citoyen contre les empiétements d’une autorité sur l’autre est violé. C’est par suite de ce principe que le Conseil d’Etat a admis le pourvoi par la voie contentieuse contre la disposition d’un décret qui, en prescrivant le curage d’une rivière non navigable ni flottable, ordonnait l’établissement d’un marchepied sur ses rives et interdisait d’y planter à moins d’un mètre de l’arête de la berge, et a annulé cette dernière disposition, comme contenant un excès de pouvoir en établissant illégalement une servitude sur les propriétés riveraines du cours d’eau. (C. d’Etat, 15 déc. 1853. Biennais.)

Nous verrons avec plus de détails, en traitant des recours et de la procédure devant le Conseil d’Etat, dans quels cas, dans quels délais et dans quelles formes ces différents pourvois peuvent être intentés. (V. 3Me. volume.)

103. Les décrets sont obligatoires pour tous les citoyens, et les tribunaux doivent les appliquer dans la limite de leur compétence. L’étendue de cette compétence varie suivant qu’il s’agit de décrets réglementaires qui statuent pour l’avenir d’une manière générale, ou de décrets individuels qui prescrivent des mesures relatives au gouvernement ou à l’administration. Les premiers, faits en vertu d’une délégation du pouvoir législatif, ont tous les caractères de la loi, et les tribunaux, quand ils sont appelés à en faire l’application, ont le droit de les interpréter comme la loi elle-même. Les seconds sont des actes du pouvoir exécutif proprement dit, par lesquels il donne des ordres, accorde des permissions et prend des mesures d’intérêt général. Les tribunaux ne peuvent que les appliquer, car, s’ils étaient