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attribué le droit de faire des arrêts de règlement obligatoires dans tout leur ressort. Rien de semblable ne peut exister aujourd’hui ; la loi ayant une source certaine, les juges n’ont d’autre droit que d’en faire l’application aux causes particulières qui leur sont soumises, sans pouvoir prononcer par voie de disposition générale et réglementaire (C. Nap., art. 5). Un grand nombre d’arrêts rendus dans le même sens ne peuvent jamais avoir qu’une autorité de jurisprudence, et n’empêchent pas un tribunal de juger dans un sens différent, lorsqu’il croit que la loi a été mal appliquée. Si, par une conséquence rigoureuse des principes constitutionnels, on refuse l’autorité législative à une longue série d’actes uniformes émanés d’un des corps les plus éclairés de la nation, comment l’accorderait-on à des usages qui ne sont quelquefois que le résultat de l’abus ou de l’ignorance ?

L’un des caractères essentiels d’une bonne législation, c’est que la volonté du législateur soit exprimée d’une manière claire et positive. Si tous les efforts de l’esprit humain ne peuvent arriver à ce résultat, s’il s’élève sur le sens de la loi la mieux faite des difficultés sans nombre, que serait-ce donc s’il s’agissait, non pas seulement de savoir en quoi consiste un usage nécessairement moins précis qu’un texte, mais encore de décider s’il existe, de chercher s’il dure depuis assez longtemps, s’il a été assez général, assez notoire pour mériter d’être érigé en loi, ou pour prévaloir contre les dispositions formelles d’une loi écrite ? Le principe que l’usage fait et abroge les lois n’est applicable que chez les peuples qui sont encore dans une période peu avancée de la civilisation, et en l’absence d’une organisation positive du pouvoir législatif ; mais, lorsque cette organisation existe, il doit faire place aux règles plus précises qu’elle