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marquer que les motifs mêmes sur lesquels s’appuie le jurisconsulte Julien, qui en est l’auteur, conduisent aujourd’hui à une conséquence opposée à la sienne : « C’est, dit-il, parce que lois puisent leur force dans le consentement du peuple, et qu’il importe peu que ce consentement soit exprimé ou tacite, qu’un long usage peut faire ou abroger les lois. » Un pareil raisonnement suppose une de ces constitutions incertaines et vagues, dans lesquelles le pouvoir législatif n’est organisé par aucune loi positive ; les besoins de la société se manifestent alors le plus fréquemment par des usages populaires, par une jurisprudence résultant soit des opinions des jurisconsultes, soit des décisions des magistrats, et ce sont là en effet les sources les plus fécondes du droit romain. Mais il ne peut pas en être ainsi dans un pays dont la constitution écrite établit un Corps législatif qui se réunit chaque année pour faire des lois ; les besoins de la société ont alors un organe régulier, à lui seul appartient le droit de créer des règles obligatoires ou de les abroger. La loi perd peut-être quelque chose, sous le rapport philosophique, à ne plus être uniquement le résultat d’une expérience éclairée par l’étude et la pratique, mais elle y gagne en clarté et en certitude.

Dans l’ancienne monarchie, où le pouvoir législatif n’avait jamais été régulièrement organisé, il n’est point étonnant qu’on ait suivi la loi romaine, en ajoutant toutefois, pour contre-balancer le principe de la souveraineté du peuple sur lequel elle s’appuie, qu’il fallait que l’usage obtint aussi le consentement exprès ou tacite du Roi. Par une conséquence toute naturelle, on avait considéré les parlements comme les meilleurs appréciateurs des usages de leurs justiciables : et ceux-ci, étendant autant que possible leur autorité, s’étaient