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GÉNÉRATION SPONTANÉE.

qui ait donné à cette erreur la forme dogmatique est Épicure : suivant lui, la terre, dans sa première énergie, avait produit tous les animaux, et même l’homme.

Plutarque convient que, de son temps, la terre, moins énergique, ne produisait plus que des rats[1]. La méprise de Plutarque a aussi sa source dans une apparence : il y a des années où les rats abondent en quantité prodigieuse ; on les voit sortir de dessous terre, pour ainsi dire. Le peuple étonné leur donne la terre pour mère.

À plus forte raison, l’idée des générations spontanées fut-elle d’abord adoptée par les poëtes. Selon les poëtes, la terre était la mère commune de toutes choses. Vous vous rappelez ce beau vers de Lucrèce :

Omniparens eadem rerum commune sepulcrum.

On comprend qu’Épicure et Plutarque, qui n’étaient pas naturalistes, aient ainsi donné dans

  1. Jamque adeo affecta est ætas, effœtaque Tellus,
    Vix animalia parva creat, quæ cuncta creavit
    Sæcla, deditque ferarum ingentia corpora partu.
    (Lucrèce, liv. II.)