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poëme.

Étrangère et timide, elle se trouve heureuse
De ramasser l’épi qu’une autre a dédaigné.
Booz, qui l’aperçoit, vers elle est entraîné.
« Ma fille, lui dit-il, glanez près des javelles ;
Les pauvres ont des droits sur des moissons si belles.
Mais vers ces deux palmiers suivez plutôt mes pas ;
Venez des moissonneurs partager le repas,
Le maître de ce champ par ma voix vous l’ordonne ;
Ce n’est que pour donner que le Seigneur nous donne. »
Il dit. Ruth à genoux de pleurs baigne sa main.
Le vieillard la conduit au champêtre festin.
Les moissonneurs, charmés de ses traits, de sa grâce,
Veulent qu’au milieu d’eux elle prenne sa place,
De leur pain, de leurs mets lui donnent la moitié ;
Et Ruth, riche des dons que lui fait l’amitié,
Songeant que Noémi languit dans la misère,
Pleure, et garde son pain pour en nourrir sa mère.

Bientôt elle se lève et retourne aux sillons.
Booz parle à celui qui veillait aux moissons :
« Fais tomber, lui dit-il, les épis autour d’elle,
Et prends garde surtout que rien ne te décèle ;
Il faut que sans te voir elle pense glaner,
Tandis que par nos soins elle va moissonner.
Épargne à sa pudeur trop de reconnaissance,
Et gardons le secret de notre bienfaisance. »

Le zélé serviteur se presse d’obéir ;