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Où est-il ?… Je veux lui dire que je le trompais !… Paul ! Paul !

Elle court de côté et d’autre, éperdue, haletante,
renversant tout devant elle. — Les couturiers et les modistes s’enfuient.

Attends-moi ! réponds ! Je vais venir ! Me vois-tu ? Écoute ! Paul !

Elle revient sur le devant de la scène, près de Couturin,
qui est le Roi des Gnomes.

Ah ! je l’ai perdu pour toujours !

Le Roi.

Par ta faute ! Tu t’y es mal prise !

Jeanne.

N’est-ce pas ? j’aurais dû me nommer !

Le Roi.

Tu en serais morte, l’oublies-tu ?

Jeanne.

Ah ! mais que fallait-il donc faire ? Et c’est moi-même qui l’ai chassé ! Plutôt que de me contraindre dans tout ce factice qui m’étouffait le cœur, j’aurais dû lui parler simplement et ne pas l’étourdir par le caquet de mes élégances ineptes. Si j’avais été une autre, je lui aurais plu peut-être ? Il lui faudrait quelqu’un avec moins de fard aux pommettes, de sottise aux lèvres, de singeries dans les manières ; une femme… qui le gagnerait par la modestie de sa tendresse… une bonne épouse… une simple bourgeoise.

Le Roi.

Tu veux en être une ?

Jeanne.

Est-ce qu’il m’aimerait alors ?