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LE CHÂTEAU DES CŒURS.

joie ! en avant ! Pétales des roses, palpitez ! Ondes, murmurez ! Lune, lève-toi !

La lune peu à peu s’est levée pendant le chœur des Fées. Elle brille maintenant sur le lac, et les fées se livrent à une joie extravagante, quand tout à coup, au milieu d’elles, et du sein d’une grosse touffe de bruyères sauvages, occupant le milieu de la scène, apparaît la Reine des Fées. Stupeur générale. Toutes s’écrient : « La Reine ! » et s’arrêtent.


Scène II.

LA REINE, LES FÉES.
La reine, d’un ton courroucé.

Comment ! voilà le soin que vous prenez des hommes !

Les fées, se récriant.

Eh ! nous n’y pouvons riens. Nous avons tout essayé.

La reine, avec véhémence.

Mais quelques minutes encore, songez-y ! et nous retombons pendant mille ans sous la domination des Gnomes, puisque cette nuit est la dernière qui nous reste pour rendre aux hommes leurs cœurs volés.

Une fée.

Ils ne se plaignent pas d’en manquer, ô Reine ! Personne, jusqu’à présent, n’a redemandé le sien. Au contraire, il y a des parents qui enseignent à leurs petits…

La reine.

Qu’importe ! Ignorez-vous donc que les Gnomes ne peuvent vivre sans les cœurs des hommes, car c’est pour s’en nourrir qu’ils les dérobent en leur mettant à la place, là (elle désigne sa poitrine), je ne sais quel rouage