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M. Vignard, chef du bureau arabe. — Des décombres devant la porte, entrée par des petits couloirs à porte basse, patio, colonnes, murs blanchis à la chaux. Son salon donne sur le marché par où je suis venu et la montée qui mène à Constantine.

Visite chez le pharmacien, le Dr Reboulot, élève de J. Cloquet. — Le secrétaire de M. Vignard, Salah-bey, petit-fils du bey de Constantine, grand jeune homme pâle, à tournure distinguée et un peu molle ; il a pris une seconde femme et s’échigne dessus. Il me mène dans les bazars, lesquels me rappellent ceux de la Haute-Égypte : tous les hommes en blanc, à figure brune ; je sens (je re-sens) cette bonne odeur d’Orient qui m’arrive dans des bouffées de vent chaud.

Visite à trois mosquées : elles sont fraîches, les tapis alternent avec des nattes. Dans l’une, un homme accroupi écrit à un petit pupitre, à côté du tombeau d’un marabout ; dans une autre, des figuiers dans la cour abritent des tombes. À la mosquée de Sid-el-Kitam, Salah-bey me montre celle de son grand-père. Il y en a quelques autres ; dans un compartiment entouré de grilles en bois, tombe d’une femme entourée de voiles verts et jaunes : c’est là que dort une de ses aïeules, une vierge mystique, qui n’a jamais voulu se marier et qui est devenue maraboute ; deux hommes dorment au pied.

Salah-bey me conduit jusqu’aux bords du Rummel, près des débris du pont d’Elcantara.

Retour chez M. Vignard. — Promenade à cheval. Il me montre, en descendant, trois gaillards grêles et étranges : ce sont des mangeurs de