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dans cet encadrement (bien entendu faisant dos à l’Ouest). Du haut du second pic, on voit le désert, d’abord mamelonné, puis s’en allant par grandes lignes plates. En se tournant vers le Nord on voit un bout du Nil. Je reviens à la tente tout seul, par le désert et derrière les montagnes. — Silence. — Silence. — Silence. — La lumière tombe d’aplomb, elle a une transparence noire. Je marche sur les petits cailloux, la tête baissée ; le soleil me mord le crâne.

Retour à Wadi-Halfa en canot, avec Maxime. — Le petit Mohammed comme le matin. — Nous sommes balancés par le vent et par les vagues, la nuit tombe, les vagues battent l’avant de notre canot qui se cabre, la lune se lève. Dans la position où j’étais, elle éclairait ma jambe droite et la partie de ma chaussette blanche comprise entre mon pantalon et mon soulier.

Lundi. — À 9 heures du matin, je pars seul à âne, pour aller à la cataracte tuer le chacal que nous avons vu la veille autour d’un crocodile mort. Mon âne est intraitable. Il ne veut aller que de côté. Je reviens à pied au bout d’une demi-heure, par le bord de l’eau, j’étais parti par le derrière de Wadi-Halfa. En allant ce matin photographier à la cataracte, Max a vu de loin un chameau qui courait, avec quelque chose de noir qui le suivait en bas : c’était un esclave des gellabs, qui s’était enfui et que l’on ramenait ainsi attaché au chameau.

Nous partons de Wadi-Halfa vers midi, la barque est démâtée. Le soir, arrêtés au milieu du fleuve, nous nous promenons au clair de lune sur un long îlot de sable, où nous causons d’Hennet,