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Ensuite on blâma M. Bouvard. De telles complaisances favorisaient le désordre. Mais Bouvard, irrité par l’insuccès de son jardin, prit la défense du peuple ; tous parlèrent à la fois.

Foureau exaltait le gouvernement, Hurel ne voyait dans le monde que la propriété foncière. L’abbé Jeufroy se plaignit de ce qu’on ne protégeait pas la religion. Pécuchet attaqua les impôts. Mme Bordin criait par intervalle :

— Moi, d’abord, je déteste la République.

Et le docteur se déclara pour le progrès :

— Car enfin, monsieur, nous avons besoin de réformes.

— Possible ! répondit Foureau, mais toutes ces idées-là nuisent aux affaires.

— Je me fiche de vos affaires ! s’écria Pécuchet.

Vaucorbeil poursuivit :

— Au moins, donnez-nous l’adjonction des capacités.

Bouvard n’allait pas jusque-là.

— C’est votre opinion ? reprit le docteur, vous êtes toisé ! Bonsoir ! et je vous souhaite un déluge pour naviguer dans votre bassin !

— Moi aussi, je m’en vais, dit un moment après M. Foureau.

Et désignant sa poche où était l’Abd-el-Kader :

— Si j’ai besoin d’un autre, je reviendrai.

Le curé, avant de partir, confia timidement à Pécuchet qu’il ne trouvait pas convenable ce simulacre de tombeau au milieu des légumes. Hurel, en se retirant, salua très bas la compagnie. M. Marescot avait disparu après le dessert.

Mme Bordin recommença le détail de ses cornichons, promit une seconde recette pour les