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le soir, quand il apparaissait au bord des cours en secouant sa longue perche garnie de taupes suspendues.

Le dommage était considérable, et, pour se reconnaître dans leur situation, Pécuchet, pendant huit jours, travailla les registres de Bouvard qui lui parurent « un véritable labyrinthe ». Après avoir collationné le journal, la correspondance et le grand-livre couvert de notes au crayon et de renvois, il reconnut la vérité : pas de marchandises à vendre, aucun effet à recevoir, et en caisse, zéro. Le capital se marquait par un déficit de trente-trois mille francs.

Bouvard n’en voulut rien croire, et plus de vingt fois ils recommencèrent les calculs. Ils arrivaient toujours à la même conclusion. Encore deux ans d’une agronomie pareille, leur fortune y passait ! Le seul remède était de vendre.

Au moins fallait-il consulter un notaire. La démarche était trop pénible ; Pécuchet s’en chargea.

D’après les opinions de M. Marescot, mieux valait ne point faire d’affiches. Il parlerait de la ferme à des clients sérieux et laisserait venir leurs propositions.

— Très bien, dit Bouvard, on a du temps devant soi.

Il allait prendre un fermier, ensuite on verrait.

— Nous ne serons pas plus malheureux qu’autrefois ; seulement nous voilà forcés à des économies.

Elles contrariaient Pécuchet à cause du jardinage, et quelques jours après, il dit :

— Nous devrions nous livrer exclusivement à