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Bouvard, une fois chez lui, se retrempait avec Lamettrie, d’Holbach, etc. ; et Pécuchet s’éloigna d’une religion devenue un moyen de gouvernement. M. de Mahurot avait communié pour séduire mieux « ces dames », et s’il pratiquait, c’était à cause des domestiques.

Mathématicien et dilettante, jouant des valses sur le piano et admirateur de Topffer, il se distinguait par un scepticisme de bon goût. Ce qu’on rapporte des abus féodaux, de l’inquisition ou des jésuites, préjugés ; et il vantait le progrès, bien qu’il méprisât tout ce qui n’était pas gentilhomme ou sorti de l’École polytechnique !

M. Jeufroy, de même, leur déplaisait. Il croyait aux sortilèges, faisait des plaisanteries sur les idoles, affirmait que tous les idiomes sont dérivés de l’hébreu ; sa rhétorique manquait d’imprévu ; invariablement, c’était le cerf aux abois, le miel et l’absinthe, l’or et le plomb, des parfums, des urnes, et l’âme chrétienne comparée au soldat qui doit dire en face du péché : « Tu ne passes pas ! »

Pour éviter ses conférences, ils arrivaient au château le plus tard possible.

Un jour, pourtant, ils l’y trouvèrent.

Depuis une heure, il attendait ses deux élèves. Tout à coup, Mme de Noares entra.

— La petite a disparu. J’amène Victor. Ah ! le malheureux !

Elle avait saisi dans sa poche un dé d’argent perdu depuis trois jours, puis suffoquée par les sanglots :

— Ce n’est pas tout ! ce n’est pas tout ! Pendant que je le grondais, il m’a montré son derrière !