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II


Quelle joie, le lendemain en se réveillant ! Bouvard fuma une pipe et Pécuchet huma une prise, qu’ils déclarèrent la meilleure de leur existence. Puis ils se mirent à la croisée, pour voir le paysage.

On avait en face de soi les champs, à droite une grange, avec le clocher de l’église ; et à gauche un rideau de peupliers.

Deux allées principales, formant la croix, divisaient le jardin en quatre morceaux. Les légumes étaient compris dans les plates-bandes, où se dressaient, de place en place, des cyprès nains et des quenouilles. D’un côté une tonnelle aboutissait à un vigneau ; de l’autre un mur soutenait les espaliers ; et une claire-voie, dans le fond, donnait sur la campagne. Il y avait au delà du mur un verger, après la charmille, un bosquet ; derrière la claire-voie, un petit chemin.

Ils contemplaient cet ensemble, quand un homme à chevelure grisonnante et vêtu d’un paletot noir longea le sentier, en raclant avec sa canne tous les barreaux de la claire-voie. La vieille