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DE GUSTAVE FLAUBERT.

Ains vous, tant docte scripteur, qui d’un font caballin espanchez à goulot mirifique vos ondes susurantes, de ce souci ne vous poinctant, ceste tant robuste pucelle qui ha nom muse, comme bon compaignon et paillard lyrique que estes, tousiours la tabourinez avec engin roide, tousiours la hacquebutez, la gitonnez, la biscotez, la glossotez, par devant, par derrière, en tous accoutremens et langaiges, à la Francoyse, à la Sinnoyse, à la Latine, à l’Alexandrine, à la Saphique, à l’Adonique, à la Dithyrambique, à la Persique, à l’Egyptiacque, en cornette, en camail, sur le coing d’ung tonneau, sur les fleurs d’ung pré, sur les coquilles du rivaige, en plain amphithéâtre ou en camère privée, brief en toutes postures et occasions.

Ie me suys bien délecté ce jourd’huy à vos distiques Catulliens. Ie vouldroys en faire tels, si pouvois, ie le dys. Comme Julius Caesar Scaliger (ung consommé ès lettres anctiques, cestuy-là) qui souloyt répéter par enthousiasme, luy plus aimer avoir faict l’ode melpomènéenne du bon Flaccus que estre roy d’Arragon (ce est une province de Hespaigne, delà les monts Pyrénéans, près Bagnères en Bigorre, où vérolés vont prendre bains pour eux guarryr ; allez, si en estes), i’ay donc curiosité véhémente de voir du tout finy votre carmen fossiléen qui estalera la pourtraicture des antiques périodes de la terre et chaos (y devoit estre un aage à rire, par la confusion qu’y estoit) et ie cuyde desia, par le loppin que i’en connoys, que sera viande de mardy-gras, régallade de monseigneur, et y fauldra estre moult riche en entendement poétique, pour en guster à