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DE GUSTAVE FLAUBERT.

qui voudrait lier des relations avec ce pays. Comme je lui ai dit que j’y avais été, que j’y avais un ami, il m’a prie de m’informer à qui s’adresser.

Adieu, mon cher Ernest, je t’embrasse ;

À toi.

197. À LOUISE COLET.

Entièrement inédite.

Pontorson, mercredi 1 heure [août].

Je t’envoie, ma chère amie, une fleur que j’ai cueillie hier au soleil couchant sur le tombeau de Chateaubriand. La mer était belle, le ciel était rose, l’air était doux, c’était un de ces grands soirs d’été, tout flambant de couleurs, d’une splendeur si immense qu’elle en est mélancolique. Un de ces soirs ardents et tristes comme un premier amour. La tombe du grand homme est sur un rocher en face des flots. Il dormira à leur bruit, tout seul, en vue de la maison où il est né. Je n’ai guère pensé qu’à lui tout le temps que j’ai passé à Saint-Malo, et cette idée de se préoccuper de sa mort et de se retenir sa place d’avance pour l’autre côté d’ici, qui me paraissait assez puérile, m’a semblé là très grande et très belle, ce qui m’a fait retourner cette question que je n’ai pas résolue : « Y a-t-il des idées bêtes et des idées grandes ? » Cela ne dépend-il pas de leur exécution ?

Ton histoire de forçat m’a ému jusqu’à la moelle des os et hier, toute la journée, j’y ai rêvé avec