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fut chargé de visiter Haïti et de faire un rapport sur ses impressions. Par lui, les progrès rapides réalisés par les fils des Africains furent constatés avec bonheur, quoique avec impartialité. Déjà quelques années auparavant, au dire de Malo[1], John Owen, ministre protestant, qui y passa vers 1820, avait su remarquer le développement subit de la société et de l’administration. Les faits portèrent leurs fruits. En 1833, l’Angleterre résolut d’abolir l’esclavage dans toutes ses colonies ; en 1848, sous l’impulsion du vaillant et généreux Schœlcher, le Gouvernement provisoire décréta la même mesure qui fut inscrite dans la constitution même de la France.

Par les citations que nous avons déjà faites du discours de Wendell Phillips on peut se convaincre facilement de quelle importance a été l’exemple d’Haïti en faveur de la cause de l’abolition de l’esclavage aux États-Unis d’Amérique. Cette vaste contrée est destinée, malgré toutes les apparences contraires, à porter le dernier coup à la théorie de l’inégalité des races. Dès maintenant, en effet, les Noirs de la grande République fédérale ne commencent-ils pas à jouer le rôle le plus accentué dans la politique des divers États de l’Union américaine ? N’est-il pas fort possible, avant cent ans, de voir un homme d’origine éthiopique appelé à présider le gouvernement de Washington et conduire les affaires du pays le plus progressiste de la terre, pays qui doit infailliblement en devenir le plus riche, le plus puissant, par le développement du travail agricole et industriel ? Certes, ce ne sont point ici de ces conceptions qui restent éternellement à l’état d’utopie. On n’a qu’à étudier l’importance chaque jour grandissante des Noirs dans les affaires américaines pour que tous les doutes disparaissent. Encore faut-il se rappeler

  1. Malo, Histoire d’Haïti depuis sa découverte jusqu’à 1824.