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tes les plaines que baigne le Nil dans son tong cours[1]. »

Les savants ont longtemps discuté sur l’interprétation qu’il faut donner, tant a la longue course d’Io qu’à la prédiction de Prométhée. Chacun a expliqué le mythe et la conception du grand tragique selon le point de vue qui agrée le plus à son imagination ou à sa conviction. Pour moi, sans m’arroger nullement le droit de trancher une question où les Patin, les Welcker, les Guignault, les Schlegel, les Quinet et tant d’autres érudits n’ont pu se mettre d’accord, je ne puis voir dans cette partie, la meilleure et la plus sublimement touchante de la tragédie d’Eschyle, qu’une esquisse géographique de l’Éthiopie et de l’Égypte, telles que les connaissaient les anciens Grecs, avant Hérodote. Eschyle aura voulu surtout, dans cette longue course d’Io, décrire l’exode du peuple égyptien que la tradition hellénique fait généralement sortir du fond de l’Afrique équatoriale, pour atteindre les bouches du Nil où il devait jeter les premières assises de la civilisation antique.

Cette description est d’autant mieux placée ici, que l’on est parfaitement autorisé à voir dans le mythe de Prométhée une allégorie poétique, symbolisant les combats de la civilisation en lutte contre les entraves du passé représentées par les dieux de l’Olympe. Cela n’a rien qui fût une cause de scandale parmi les Athéniens et s’adapte très bien avec les idées de l’antiquité.

Le noir Epaphus personnifiant le peuple Égyptien est, dans la conception du poète, le canal par lequel la civilisa-

  1. Εστιν πολις…
    Επωγυμον δε των Διος γεννηματων
    τεξεις χελαινον Επαφον, ος χαρπωσεται
    οσην πλατυρρους Νειλος αρδευει χθονα.

    (Eschyle, Prométhée enchaîné, v. 838-844.)