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mettre ni avec la classe supérieure qui la méprise, ni avec la classe inférieure qu’elle méprise à son tour, elle devient inconsistante et faible, obligée de louvoyer entre deux courants opposés, où il n’y a pour elle ni attrait ni encouragement. Or, la vitalité est toujours en raison directe du degré d’expansion qu’une race, une famille, un groupe quelconque rencontre dans le milieu et les circonstances où il fait son évolution. Il se conçoit bien, dès lors, que des métis qui se trouvent resserrés entre deux races facticement divisées en supérieure et inférieure, dépérissent lentement et décroissent en énergie vitale. Un Guillard ou un Bertillon n’aurait aucunement hésité dans l’interprétation des phénomènes que M. Boudin attribuait à des causes ethnologiques.

Il faut passer maintenant à la question de l’intelligence des métis. Je resterai conséquent, suivant la vraie méthode scientifique, en ne prenant pour base de mon argumentation que les mêmes mulâtres d’Haïti. Ici encore, il est facile de se convaincre que si les métis de Hollandais et de Malais, — deux races beaucoup plus rapprochées, selon les théories polygénistes même, que ne le sont les noirs africains et les blancs européens, — ne font pas preuve d’une grande intelligence, on ne doit logiquement pas rapporter ce cas à une influence ethnologique. Les conditions sociales qui leur sont faites, à cause du préjugé même qu’on nourrit contre leurs aptitudes intellectuelles, en sont des motifs beaucoup plus plausibles.

Avant l’indépendance de l’île d’Haïti et surtout pendant que l’esclavage y régnait, on avait établi le même jugement contre les mulâtres haïtiens. Maltraités et méprisés par leurs pères blancs qui les regardaient comme les tristes fruits d’une mésalliance entre le pur sang caucasique et l’immonde sève africaine, ils végétaient dans le pays comme une espèce parasite, livrés au vagabondage ou ne s’occu-