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l’acide sulfurique, et à distiller ensuite dans le vide le produit de cette opération, au moyen d’un appareil semblable à celui dont on se sert dans les raffineries de sucre pour évaporer les dissolutions sucrées.

Mais la nécessité de faire et de maintenir un vide exact dans un vase de dimensions considérables, apportait un tel obstacle à l’exécution de ce procédé, que l’on ne put réussir à le mettre en pratique.

Un autre industriel, anglais, M. George Clarke, avait, de son côté, essayé de tirer parti, pour les manufactures, du fait scientifique signalé par M. Frémy ; mais il n’avait pas eu recours à la distillation. La difficulté de retirer l’acide stéarique pur des corps gras traités par l’acide sulfurique concentré, devait faire échouer la tentative de M. Clarke.

Cette importante question, qui avait été abordée sans succès en Angleterre, devint ensuite l’objet des études de l’industrie française.

En 1841, M. Dubrunfaut prit un brevet pour la distillation des corps gras. Il opérait, comme Gay-Lussac, en provoquant la volatilisation des acides gras par un courant de vapeur, qui traversait les matières distillées. Mais, pas plus que Gay-Lussac, M. Dubrunfaut n’avait songé à faire intervenir l’action préalable de l’acide sulfurique, car la purification des huiles était surtout l’objet qu’il avait en vue. La question n’était donc pas plus avancée qu’auparavant.

La méthode qui nous occupe ne pouvait exister qu’à la condition de faire marcher concurremment la saponification par l’acide sulfurique et la distillation par l’intermédiaire de la vapeur. Or, la combinaison de ces deux moyens a été pour la première fois réalisée en Angleterre par M. Wilson.

Une patente prise en 1842, par MM. William Coley, Jones et George Wilson, spécifie, en effet, l’emploi combiné de l’acide sulfurique et de la distillation.

La préparation des acides gras au moyen de cette méthode nouvelle, fut établie en Angleterre, vers 1844, par M. Wilson, dans les ateliers de la Société Price. À partir de cette époque, elle fut employée industriellement chez M. Wilson. Ce procédé était appelé à jouer un rôle de la plus haute importance en Angleterre, puisque l’huile de palme, qui ne peut être traitée par la saponification calcaire, est le produit presque exclusivement exploité dans ce pays.

La fabrication des bougies au moyen de la distillation, a été établie en France, pour la première fois, par deux manufacturiers de Neuilly, MM. Masse et Tribouillet, cessionnaires du brevet Dubrunfaut. Leur exploitation commença vers 1846. Mais ces industriels, qui eurent à combattre tous les obstacles que rencontre une fabrication établie sur des données toutes nouvelles, furent obligés de s’arrêter en présence de difficultés financières. MM. Moinier et Jaillon, qui se chargèrent de la suite de leur établissement, continuèrent avec succès la fabrication des bougies au moyen de la distillation.

À partir de l’année 1856, époque à laquelle expiraient les brevets d’invention, la préparation des acides gras au moyen de l’acide sulfurique et de la distillation, s’est répandue d’une manière générale dans les fabriques de Paris. Voici comment on opère aujourd’hui, en suivant le procédé pratique dû à M. Knabb.

On commence par traiter le corps gras par l’acide sulfurique, en ne laissant l’action s’exercer qu’un temps fort court. L’acide sulfurique provoque la décomposition du corps gras en glycérine et en acides sulfo-gras, décomposables par l’eau bouillante, qui met en liberté les acides gras.

La figure 55 représente l’appareil qui sert dans l’industrie, pour cette opération. A, est un réservoir en bois doublé de plomb, et contenant l’acide sulfurique. Cet acide est maintenu à la température de 90 degrés, par un courant de vapeur d’eau amené d’une