Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 4.djvu/580

Cette page a été validée par deux contributeurs.

bre 1832, fut décidée la création de trois puits artésiens, l’un au Gros-Caillou, le second près de la place de la Madeleine, et le troisième dans le faubourg Saint-Antoine, au carrefour de Reuilly. L’exécution du puits du Gros-Caillou devait être confiée à MM. Flachat frères, celui du carrefour de Reuilly à M. Degousée, et celui de la Madeleine à M. Mulot. Une somme de 6 000 francs seulement était affectée à chacun de ces trois forages.

Cette allocation modique montre bien qu’on ne voulait faire jaillir que les eaux de la nappe qui alimentait les puits artésiens des environs, et qui n’est située qu’à une faible profondeur. Cependant on ne tarda pas à se convaincre que cette nappe peu profonde ne fournirait qu’un débit insignifiant, et que la couche située beaucoup plus bas, c’est-à-dire placée au-dessous de la craie et qui forme la base du bassin géologique de Paris, pourrait seule fournir une eau jaillissante dans les trois points choisis.

M. Mulot, dont la sonde s’était déjà exercée inutilement jusqu’à 170 mètres, à Suresne, chez M. Rothschild ; à 250 mètres, à Chartres ; à 330 mètres, à Laon, etc., démontra, par sa propre expérience, que si l’on ne se décidait point à descendre jusqu’au-dessous de la craie du terrain secondaire, on n’obtiendrait jamais, à Paris, une source jaillissante de quelque abondance. Il parvint à convaincre de cette vérité M. Emmery, alors ingénieur en chef des eaux de Paris.

Le préfet de la Seine, M. de Bondy, écouta cet avis, et réclama les conseils de la science. Il s’adressa à un ingénieur qui avait une grande autorité dans cette question, M. Héricart de Thury. L’avis de ce savant fut conforme à celui que M. Mulot avait émis comme praticien.

Le préfet de la Seine demanda alors à M. Héricart de Thury, un rapport, que ce dernier s’empressa de rédiger, et dont la conclusion était qu’on ne trouverait d’eau jaillissante dans le bassin géologique de Paris qu’en creusant jusqu’au bout de la craie, jusqu’à 550 mètres environ.

Le projet de M. Héricart de Thury, approuvé par le conseil des mines, rallia les suffrages du conseil municipal de Paris. Il fut décidé seulement qu’au lieu de creuser trois puits, on se bornerait à un forage unique. L’exécution de ce puits fut confiée à M. Mulot.

Les cinq abattoirs, lieux de très-grande consommation d’eau, coûtaient alors à la ville de Paris 34 000 francs environ chaque année, pour leur approvisionnement. Il était donc naturel que l’administration commençât, pour alléger ce chapitre onéreux de dépense, par forer dans l’un des abattoirs le puits projeté. M. de Rambuteau, successeur de M. de Bondy, décida que le puits artésien serait creusé à Grenelle.

Le 29 novembre 1833, les équipages de sonde de M. Mulot furent amenés à Grenelle, et le forage commença le 30 décembre. L’appareil moteur se composait d’une chèvre ordinaire et d’un treuil à deux volants de 3m,50 de diamètre, manœuvrés chacun par cinq ou six hommes.

Il s’agissait de traverser une série alternante de couches d’argiles et de sables composant les terrains tertiaires, puis une épaisseur considérable de craie, au-dessous de laquelle se trouvent les sables verts qui renferment la nappe jaillissante. D’après le cahier des charges, le diamètre du sondage à la surface du sol, devait être de 45 centimètres.

On n’avait aucune idée précise de l’épaisseur du banc de craie ; mais l’on pensait qu’en partant de 45 centimètres, le diamètre du trou de sonde serait encore assez grand à la base, pour que le débit du puits suffît amplement aux besoins qu’on prétendait satisfaire. Le marché conclu entre la ville et M. Mulot avait été fait en prévision d’un forage de 400 mètres de profondeur.