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l’éclairage ; 2o des hydrocarbures plus consistants, qui peuvent servir à la fabrication des graisses pour les voitures, ou des goudrons asphaltiques pour les trottoirs des rues.

La production de l’huile éclairante de schiste est donc répartie dans trois centres d’exploitation : la mine, l’usine de distillation du minerai, et l’usine de rectification des liquides obtenus.

On n’a pu parvenir à trouver encore un emploi avantageux au résidu de la distillation des schistes bitumineux. Sous ce point de vue, l’extraction des hydrocarbures des schistes est loin d’offrir les avantages que présente l’extraction du gaz de la houille. La houille, en effet, laisse dans la cornue, le coke, dont les débouchés sont certains, tandis que le résidu laissé par le schiste n’a aucune valeur.

On avait proposé d’utiliser ce résidu, soit comme absorbant, soit comme désinfectant, soit comme amendement dans la culture ; mais les frais de transport deviendraient considérables ; il faudrait donc s’en servir sur place, chose impossible. La quantité de résidus résultant du travail de chaque jour est un véritable embarras ; elle finit par encombrer, en formant de petites collines, les environs des usines.

L’idée d’appliquer à l’éclairage les produits de la distillation des schistes, appartient à un manufacturier de Paris, Selligue, qui créa la première usine de ce genre. Dans l’origine, Selligue voulait consacrer l’huile de schiste à produire du gaz pour l’éclairage. La pensée lui vint plus tard de consacrer directement à l’éclairage, ce liquide, convenablement purifié. Seulement, il fallait construire des lampes d’une disposition spéciale. Selligue imagina et fit construire les premières lampes à schiste. Il fit élever l’huile jusqu’au bec par la simple capillarité de la mèche. Il adopta le bec d’Argand pour provoquer un double courant d’air, et il interposa au milieu de la flamme, un disque métallique horizontal qui étale et amincit cette flamme, et qui multiplie assez les contacts de l’oxygène de l’air avec la vapeur combustible pour que cette vapeur brûle sans qu’aucune portion échappe à la combustion. La richesse de l’huile de schiste en carbone fait qu’elle brûle avec un éclat extraordinaire.

La figure 104 représente la lampe à schiste inventée par Selligue. On voit posé par-dessus le bec, un mince disque métallique, a, qui étale la flamme en une sorte de couronne évasée, forme excellente pour assurer une combustion complète. L’air arrive au bec par la galerie bc.

Il existe un autre modèle de lampe à schiste, dans lequel l’air arrive par la base de la lampe et suit le long trajet que l’on voit indiqué sur la figure 105. L’entrée principale de l’air se trouve à la partie inférieure de la lampe. Une règle a, que l’on enfonce à volonté, sert à graduer le volume d’air qui doit servir à la combustion.

Après la mort de Selligue, une compagnie s’organisa pour développer cette industrie. On opérait la distillation dans des cornues cylindriques placées verticalement dans le fourneau. Cette disposition permettait de charger et de décharger facilement les cornues, mais la partie intérieure, le noyau du milieu, n’était presque jamais distillée. Aujourd’hui, après divers essais et diverses formes données aux cornues, on a adopté une forme plate et élevée. Ces cornues se chargent par-dessus et se déchargent par devant. On se sert quelquefois de cornues de forme allongée, comme les premières qu’employa Selligue, en les plaçant obliquement dans le fourneau.

Le mode de fractionnement des hydrocarbures bruts, est d’une grande importance dans une usine de schiste. Dans l’origine, le produit de la première distillation, c’est-à-dire l’huile brute, recevait deux emplois : on la rectifiait, pour en retirer le liquide destiné à l’éclairage, et le résidu de cette seconde distillation servait à la fabrication