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ment manifeste à suivre les idées qui successivement paraissaient les meilleures, l’effectif de la marine cuirassée anglaise était loin d’être en rapport avec celui de l’ancienne flotte à vapeur de la même puissance. Aussi, en vue de rétablir le plus promptement l’équilibre, des ordres furent-ils donnés pour transformer en frégates cuirassées divers bâtiments en bois alors en chantier. Ce furent :

1o Sur les plans de M. Watts et de l’amiral Spencer Robinson, le Royal-Oak, le Prince-Consort, le Caledonia, l’Ocean, le Royal-Alfred. La construction de ces vaisseaux de guerre à hélice, porteurs de 90 canons, avait été commencée en 1857 et 1858, à la suite des magnifiques résultats du Napoléon, signalés en France. On changea aussitôt leur système de construction. On rasa une de leurs batteries, on allongea les navires par le milieu, on les modifia à l’avant et à l’arrière ; en un mot, on exécuta pour cette transformation un travail si considérable, qu’on peut douter que des constructions neuves eussent entraîné plus de dépenses.

Les dimensions de ces vaisseaux sont modérées. Ils ont 83m, 20 de longueur et un déplacement d’eau de 6 600 tonneaux. Dans les quatre premiers, la cuirasse, épaisse de 0m,115 y règne de bout en bout à la flottaison, et sur toute la hauteur de la batterie. Dans le Royal-Alfred on a supprimé le blindage des œuvres mortes avant et arrière ; mais l’épaisseur de la cuirasse, dans la partie centrale, est portée à 0m,15.

2o Le Royal-Sovereign, ancien vaisseau à trois ponts transformé en navire à tourelles. Ce type spécial, préconisé depuis longtemps par le capitaine Coles, avait été réalisé pour la première fois dans le Monitor américain, construit par Éricsson. Nous reviendrons plus loin sur les navires cuirassés à tourelles, auxquels nous consacrerons un chapitre spécial.

3o Le vaisseau le Zealous, puis les corvettes Favorite et Research, qui reçurent un blindage partiel, d’après les plans de M. Reed, mais sur lesquels la cuirasse épaisse de 0m,115 protège toute la flottaison, et une tourelle centrale, où sont logées les bouches à feu.

Dans plusieurs des navires en fer de la marine britannique, dont il vient d’être parlé, il existe, au-dessous de la flottaison, une proéminence, une sorte d’éperon, qui les a fait désigner sous le nom de béliers à vapeur. Mais les étraves de ces bâtiments n’ont, à vrai dire, aucune consolidation intérieure spéciale. On ne peut donc les considérer comme pouvant agir résolument par le choc de leur masse, à la façon du bélier antique. Le choc par l’avant serait aussi fatal à eux-mêmes qu’au navire choqué.


CHAPITRE VIII

la nouvelle flotte cuirassée anglaise. — les bâtiments cuirassés à batteries et à fort central. — l’enterprise. — la pallas. — la penelope. — les grands vaisseaux de guerre à batteries. — le bellerophon et l’hercules.

En Angleterre comme en France, les progrès continuels de l’artillerie à grande puissance ont obligé, d’une part, à augmenter l’épaisseur du blindage des navires ; d’autre part, à adopter des bouches à feu de très-fort calibre, réduites à un petit nombre, en raison de leur poids excessif.

Cette double nécessité amena les constructeurs anglais au système des navires à fort central, que nous avons déjà signalé dans la Favorite et la Research. L’opinion publique se prononçait, en Angleterre, contre les longueurs excessives des bâtiments de guerre ; la facilité de manœuvre sous vapeur paraissait la qualité à laquelle on devait attacher le plus d’importance. On avait aussi des arguments contre les lourdes voilures ; il paraissait plus utile d’employer ce poids à porter des munitions et une plus forte cuirasse.