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vu que les résidus de la combustion des deux airs avec le gaz hydrogène étaient exactement les mêmes.

« Saussure fils a aussi trouvé, en se servant du gaz nitreux, que l’air pris sur le col du Géant contenait à un centième près, autant d’oxygène que celui de la plaine ; et son père a constaté la présence de l’acide carbonique sur la cime du mont Blanc. De plus, les expériences de MM. Cavendish, Maccarty, Berthollet et Davy, ont confirmé l’identité de composition de l’atmosphère sur toute la surface de la terre. On peut donc conclure généralement que la constitution de l’atmosphère est la même depuis la surface de la terre jusqu’aux plus grandes hauteurs auxquelles on puisse parvenir.

« Voilà les deux principaux résultats que j’ai recueillis dans mon premier voyage : j’ai constaté le fait que nous avions observé, M. Biot et moi, sur la permanence sensible de l’intensité de la force magnétique lorsqu’on s’éloigne de la surface de la terre, et de plus, je crois avoir prouvé que les proportions d’oxygène et d’azote qui constituent l’atmosphère ne varient pas non plus sensiblement dans des limites très-étendues. Il reste encore beaucoup de choses à éclaircir dans l’atmosphère, et nous désirons que les faits que nous avons recueillis jusqu’ici puissent assez intéresser l’Institut pour l’engager à nous faire continuer nos expériences. »

En terminant la relation de son beau voyage, Gay-Lussac exprimait comme on vient de le lire, le vœu que l’Académie lui donnât les moyens de continuer cette série d’expériences intéressantes. Malheureusement ce vœu ne fut pas alors accompli. Après le voyage de MM. Biot et Gay-Lussac, les seules ascensions effectuées dans l’intérêt exclusif des sciences, se réduisent à une courte excursion aérienne faite en Amérique par M. de Humboldt, qui n’apprit rien de nouveau sur la physique du globe. Il faut franchir un intervalle de près de cinquante ans pour trouver des ascensions exécutées dans un intérêt purement scientifique. Nous aurons à signaler plus loin les belles ascensions aérostatiques faites en vue de l’étude de la constitution physique de l’air en France, par MM. Barral et Bixio, en 1850 ; et en Angleterre, par M. Glaisher en 1864. Mais avant d’en venir là, nous devons continuer de présenter, selon l’ordre historique, la marche et le développement de l’aérostation.


CHAPITRE XIII

l’aérostation dans les fêtes publiques. — le ballon du couronnement. — nécrologie de l’aérostation. — mort de madame blanchard. — zambeccari. — harris. — sadler. — olivari. — mosment. — bittorf. — émile deschamps. — le lieutenant gale.

Nous avons à suivre l’aérostation dans une dernière phase de son histoire, où son programme s’est malheureusement modifié. Il est à remarquer que l’aérostation, qui avait été prise, au début, sous le patronage des Académies et des savants, fut, à partir de cette époque, entièrement délaissée par eux. L’Académie des sciences de Paris, en 1783, avait engagé tous les savants français, à lui faire parvenir les résultats de leurs observations sur les aérostats : elle voulait centraliser elle-même ce genre de recherches. En 1784, l’Académie de Dijon, à l’instigation de Guyton de Morveau, avait procédé à de longues et coûteuses expériences, sur la question de la direction des aérostats. En 1802, l’Académie de Saint-Pétersbourg avait encouragé Robertson, et l’Académie des sciences de Paris avait provoqué, comme nous venons de le dire, les expériences aérostatiques de Biot et de Gay-Lussac. Mais à partir de ce moment, dégoûtée sans doute du peu de résultats positifs fournis par une méthode et un instrument d’observation dans lesquels on avait mis un moment tant d’espoir, la science sérieuse tourne, pour ainsi dire, le dos à l’aérostation. Du domaine des études sérieuses, elle tombe alors dans celui de l’exploitation. Désormais elle se préoccupe d’étonner plutôt que d’instruire, et lorsqu’elle vise par moments à des succès moins vulgaires, c’est sur le côté problématique de la découverte de Montgolfier, sur le problème de la direction des ballons, qu’elle concentre ses efforts. Le règne des aéronautes de profession succède à celui des courageux explorateurs, émules de Pilâtre et de Montgolfier. Le métier remplace la science ;