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traite de l’enveloppe et de la matière du ballon ; la seconde a pour objet l’examen des gaz qui peuvent servir à provoquer son élévation ; la troisième traite de la possibilité de diriger les aérostats ; la quatrième renferme la description de l’appareil dirigeable que Guyton avait imaginé et qu’il expérimenta à différentes reprises.

L’aérostat de l’Académie de Dijon, que nous représentons à part (fig. 271) était de soie, recouverte d’un vernis gras et siccatif. Sa partie supérieure était coiffée, en partie, d’un fort filet en tresse de rubans, de seize lignes de largeur, venant s’attacher, vers la moitié du globe, à un cercle de bois, qui l’entourait comme une ceinture et supportait, au moyen de cordes, la nacelle. Ce cercle servait en même temps à supporter deux voiles placées aux deux extrémités opposées, et qui étaient destinées à fendre l’air dans la direction que l’on voulait suivre. Ces voiles étaient composées de toile tendue sur un cadre de bois. Sur l’une de ces voiles, de sept pieds de haut et de onze pieds de large, étaient peintes les armes de la famille de Condé. L’autre, qui était bariolée comme un pavillon et qui avait une dimension de soixante-six pieds carrés devait fonctionner comme une sorte de gouvernail. En outre, deux rames, placées entre la proue et le gouvernail, devaient battre l’air comme les ailes d’un oiseau. Ces dernières rames présentaient à l’air une surface de vingt-quatre pieds carrés. Les rames, la proue et le gouvernail, devaient être manœuvrés, à l’aide de cordes, par les aéronautes placés dans la nacelle.

À la nacelle étaient attachées d’autres rames plus petites.

C’est avec ces moyens d’action que Guyton de Morveau, de Virly et l’abbé Bertrand essayèrent de se diriger dans les airs. L’insuccès qu’ils éprouvèrent démontra qu’il était impossible de se servir, comme moyen de direction, d’engins aussi faibles, et surtout de se contenter, comme moteur, de la force de l’homme. Cependant les expériences des académiciens de Dijon sont les plus sérieuses que l’on ait faites, pour essayer d’imprimer une direction à un esquif aérien. C’est ce qui nous engage à reproduire le récit de l’une de leurs ascensions. Nous choisirons comme la plus intéressante, celle qui fut faite par Guyton de Morveau et M. de Virly, le 12 juin 1784.

« L’objet principal de cette expérience, dit Guyton de Morveau, était l’essai des moyens de direction, dont une partie avait été brisée, au moment de l’ascension du 25 avril, par la violence du vent, et avant que l’on eût lâché les cordes : c’était dans cette vue que plusieurs amateurs s’étaient réunis pour ouvrir une nouvelle souscription.

Le départ avait été fixé pour la première fois au samedi 12 juin, et annoncé huit jours auparavant par une affiche. Le vendredi 11, on commença, vers les 7 heures du soir, à charger les appareils qui ont été décrits dans le procès-verbal de la première expérience.

Le ballon fut rempli à 4 heures du matin, et le canon annonça que l’on était occupé à appareiller.

Nous montâmes dans l’aérostat, M. de Virly et moi, à 7 heures ; nous nous fîmes apporter les quatre cercles attachés au cercle équatorial, qui servaient à retenir le ballon ; nous les attachâmes aux quatre coins de la gondole. Six personnes étaient appuyées sur la galerie pour la fixer à terre ; nous les invitâmes à s’écarter, et nous partîmes sur-le-champ en nous élevant presque perpendiculairement.

Il était alors 7 heures 7 minutes ; le baromètre était à 27 pouces 8 lignes, le thermomètre à 15 degrés ¼, l’hygromètre de M. de Saussure à 83 degrés ½, c’est-à-dire 33 degrés ½ d’humidité, en les comptant du terme moyen ;

Le vent, assez faible, soufflait nord-nord-ouest, et même approchant du nord-quart-nord-ouest, puisqu’au moment de l’ascension, plusieurs personnes jugèrent, à la vue d’une carte sur laquelle les rumbs étaient tracés, qu’il devait nous porter sur Bourg-en-Bresse. Les deux flèches du plan joint à ce procès-verbal, indiquent sa direction nord-nord-ouest.

Nous étions chargés de cent livres de lest, trente à l’avant, soixante-dix à l’arrière de la gondole, de deux bouteilles pleines d’eau pour prendre de l’air, de provisions, d’habits pour nous défendre du froid, etc., le tout pesant environ vingt-cinq livres, non compris les instruments.

L’abaissement du mercure dans le baromètre était à peine sensible, que la dilatation était déjà considérable. Nous vîmes le ballon très-arrondi, et une légère vapeur autour de l’appendice nous annonçait que le gaz commençait à s’échapper par la soupape