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d’arsenic, si l’on opère avec de l’arsenic, etc… Je me servis de fils d’or pour réduire de cette manière l’ammoniure de platine que j’ai dernièrement obtenu et examiné. Le platine ainsi réduit sur l’or a une couleur qui tourne vers le noir ; mais, étant frotté entre deux morceaux de papier, il prend l’éclat de l’acier. Je fis usage de fil d’argent pour réduire l’or, ce qui réussit promptement[1]. »

« J’ai dernièrement doré, d’une manière parfaite, dit le même chimiste dans un autre journal, deux grandes médailles d’argent, en les faisant communiquer, à l’aide d’un fil d’acier, avec le pôle négatif d’une pile de Volta, et en les tenant, l’une après l’autre, dans des ammoniures d’or nouvellement faits et bien saturés[2]. »

En 1807, un recueil scientifique italien, la Bibliotheca di Galiardo, ajouta quelques renseignements à la description qui précède. Nous rapporterons ce dernier passage, pour éclaircir ce que cette première citation a d’obscur et de laconique.

« Prenez une partie saturée d’or dissous par l’eau régale, ajoutez-y six parties d’ammoniaque liquide, la dissolution s’y décompose, et il se précipite un thermoxyde d’or, qui se dissout aussitôt en partie pour former l’ammoniure d’or. On recueille ce mélange dans un vase de verre. Les objets destinés à être dorés sont fixés solidement à un fil d’acier ou d’argent, que l’on fait ensuite communiquer au pôle négatif d’une pile voltaïque. L’objet en argent qui doit être doré doit être plongé entièrement dans le liquide contenant l’ammoniure d’or. Le courant galvanique est fermé par une grosse bande de carton mouillé, qui de l’ammoniure passe au pôle négatif de la pile. En quelques heures l’argent se trouve entièrement doré par l’action galvanique. La dorure peut être mise en couleur par les moyens ordinaires, et on lui fait prendre le plus vif éclat avec la gratte-boësse des doreurs[3]. »

Il est donc bien établi que Brugnatelli est le premier qui ait doré par l’emploi de la pile voltaïque. Seulement son expérience donne carrière à bien des discussions. Brugnatelli parle, en effet, d’ammoniures d’or et d’argent dissous. Mais l’ammoniure d’or et d’argent, c’est-à-dire l’or et l’argent fulminants, sont insolubles, et l’auteur ne dit pas dans quel véhicule il les a fait dissoudre. On ne saurait admettre qu’il opérât sur ces composés insolubles, car le courant électrique aurait été sans action sur eux. Dans un rapport d’expertise, MM. Barral, Chevallier et Henri, ont essayé de répéter l’expérience de Brugnatelli, en suivant les indications données par l’auteur, et ils n’ont obtenu qu’une dorure fort imparfaite ; de sorte qu’on ne peut savoir avec quel dissolvant de l’or ou de l’argent fulminant opérait Brugnatelli dans l’expérience dont on a tant parlé.

De tout cela, il faut, selon nous, conclure que les expériences du physicien de Pavie, exécutées tout à fait au début de la science, ne furent que des tâtonnements, des essais, auxquels l’auteur dut renoncer promptement, par suite de l’insuccès qu’il éprouva.

Un physicien, dont nous avons souvent cité le nom, M. de la Rive, de Genève, reprit, en 1825, les essais de Brugnatelli. Il essaya de dorer les métaux en décomposant le chlorure d’or par la pile, et plaçant au pôle négatif l’objet à dorer.

M. de la Rive ne put parvenir à aucun résultat, par cette raison que le chlorure d’or décomposé par la pile mettait en liberté du chlore, lequel attaquait le cuivre qu’il s’agissait de dorer. Le physicien de Genève ne parvint à dorer que le platine, résultat pratique d’une assez mince utilité, on en conviendra, et cela parce que le platine n’est pas attaqué à froid par le chlore provenant de l’action de la pile sur le chlorure d’or.

« Mes essais ne furent pas heureux, dit M. de la Rive, je ne réussis à dorer que le platine. Quant au laiton et à l’argent, je ne réussis point à les dorer. L’action chimique qu’exerçait sur ces métaux la dissolution d’or, toujours très-acide, les dissolvait eux-mêmes et empêchait l’or d’adhérer à leur surface[4]. »

Quinze ans après cette époque, c’est-à-dire en 1840, guidé par les beaux résultats obtenus par M. Becquerel avec des courants électriques d’une faible intensité, encouragé

  1. T. V, p. 80.
  2. Même volume, p. 357.
  3. T. X, p. 185.
  4. Annales de chimie et de physique, t. CXXIII, p. 399.