Page:Fierens-Gevaert - Van Dyck, Laurens.djvu/85

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
79
VAN DYCK.

presque tous, ont le même « sang bleu ». Quelle surprise de voir sous les aspects d’un penseur mélancolique Pierre Brueghel, le peintre des kermesses rouges et des enfers grotesques ! Et l’on ne saurait dire que Van Dyck prêta sa propre beauté à ses amis. Ces portraits sont des documents d’une franchise absolue. Ses confrères se seraient moqués de lui, s’il avait songé le moins du monde à les embellir.

Or, l’art de tous ces maîtres n’est pas à leur image. L’art flamand du XVIIe siècle a des penchants populaires marqués ; il fréquente volontiers une humanité vulgaire, quitte à l’ennoblir par son interprétation. Ces peintres assurément ne se reconnaissent point dans leurs modèles. Ils devaient bien plutôt se sentir déclassés en leur présence. Van Dyck, au contraire, portraitiste de la société aristocratique et intellectuelle de son temps, restait à son niveau. Et il n’est vraiment pas exagéré de dire qu’aucun Anversois de son temps ne réalisa un idéal plus en accord avec sa culture, ses aspirations et ses dons naturels.

Van Dyck allait grandir encore. Sans doute il avait atteint souvent la perfection, pendant cette période flamande ; ses œuvres avaient ébloui la foule et les artistes ; comme le remarque Reynolds, les portraits d’alors « mettent du soleil dans l’appartement ». Et pourtant, à l’ensemble de cette production il manque encore, suivant nous, un sceau définitif, irrécusable. Le génie n’y vibre pas avec un enthousiasme absolument libre.