Page:Fierens-Gevaert - Van Dyck, Laurens.djvu/126

Cette page a été validée par deux contributeurs.
120
VAN DYCK.

jusqu’où Lebrun, Puget, Rigaud poussaient la religion du grand charmeur. On peut facilement s’imaginer après cela ce que fut l’empressement des « gens de goût et de qualité ».

Le XVIIIe siècle y mit plus de ferveur encore que le précédent. Les Mémoires secrets de Bachaumont nous en fournissent une preuve caractéristique. Voici ce qu’on lit dans ce curieux mémorandum.

« 25 mars 1771. — L’impératrice de Russie a fait enlever tout le cabinet de tableaux de M. le comte de Thiers, amateur distingué qui avait une belle collection en ce genre. M. de Marigny a eu la douleur de voir passer ces richesses chez l’étranger, faute de fonds pour les acquérir pour le compte du roi. On distinguait, parmi ces tableaux, un portrait en pied de Charles Ier, roi d’Angleterre, original de Van Dyck. C’est le seul qui soit resté en France. Mme la comtesse Dubarri, qui déploie de plus en plus son goût pour les arts, a ordonné de l’acheter. Elle l’a payé 24 000 livres. »

Si cette note prouve que déjà au XVIIIe siècle l’étranger triomphait trop souvent dans les ventes, elle montre aussi que, voulant passer pour un « collectionneur » distingué, la Dubarri disputait à la grande Catherine une œuvre de Van Dyck, de préférence à tout autre tableau. Il est vrai que les Mémoires de Bachaumont cachent une malice sous leur style de procès-verbal, car la note ajoute :

« Sur l’observation qu’on lui faisait de choisir un pareil morceau entre tant d’autres qui auraient dû mieux lui