Page:Fielding - Tom Jones ou Histoire d'un enfant trouvé, tome 4.djvu/231

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Blifil, Sophie pâlit d’effroi et pensa s’évanouir. Sa tante, au contraire, rougit de colère, et conservant toute sa présence d’esprit, apostropha l’écuyer en ces termes :

« Mon frère, je suis étonnée de votre conduite. N’apprendrez-vous jamais à observer les règles de la bienséance ? Regarderez-vous toujours la maison où vous entrez comme la vôtre, ou comme celle d’un de vos fermiers ? Vous imaginez-vous avoir le droit de pénétrer dans l’appartement des femmes de condition, sans respecter la décence, sans vous faire annoncer ?

— Que diable me contez-vous là ? On diroit que je vous ai surprise à…

— Point d’équivoques grossières, monsieur, je vous en prie. Vous avez tellement effrayé ma nièce, qu’elle est prête à se trouver mal… Allez, mon enfant retirez-vous, et tâchez de reprendre vos sens ; car je vois que vous en avez besoin. »

Sophie, qui n’avoit jamais reçu d’ordre plus agréable, se hâta de sortir.

« En vérité, ma sœur, vous êtes folle, dit l’écuyer. J’amène ici M. Blifil pour faire sa cour à ma fille, et vous la renvoyez !

— Avec votre permission, mon frère, dans l’état où vous savez que sont les choses, c’est vous-même qui êtes plus que fou de… j’en demande pardon à M. Blifil ; mais il n’ignore pas à