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conquis… C’est une femme sérieuse… Pourquoi ne m’avez-vous jamais parlé d’elle ?

— Pourquoi ?… mais sais-je où tu es la plupart du temps ? M’écris-tu souvent ?… Combien de fois t’ai-je vu depuis ton enfance ?

— C’est vrai… je suis inexcusable… Je vais vous gâter dorénavant… À Vichy… je serai votre cavalier… et je ne supporterai pas que vous flirtiez avec les vieux colonels…

— Ah ! on peut dire que tu es utilitaire… toi ! tu n’as pas la fierté de Sylviane… Tu te cramponnes à moi dans une intention non déguisée… Je plains cette jeune fille qui te trouvera sur son chemin à chacun de ses pas…

Bien que ce dialogue fût prononcé en gaîté, le fond en était sérieux.

Luc Saint-Wiff avait à cœur de réparer sa maladresse parce que Sylviane lui plaisait infiniment.

S’il avait été attiré vers elle, dès la première rencontre, par sa beauté prenante, il venait d’être séduit par la noblesse de son caractère. Il l’aimait d’autant plus que sa demande avait été repoussée et cette attitude décuplait sa ferveur.

Les voyages ne lui agréaient plus ; les horizons inconnus perdaient de leur prestige.

Jamais départ ne fut préparé avec plus d’enchantement et d’angoisse.

Luc souriait en préparant ses malles, et soudain il s’arrêtait, mordu au cœur par le doute. Il serrait ses tempes à deux mains et se disait : Je suis fou… que vais-je faire à Vichy… sûrement « elle » me regardera d’un air courroucé… et je regretterai mon déplacement.

Mais bientôt l’espoir le reprenait et il pensait qu’il était impossible que Sylviane ne se laissât pas fléchir devant ses prières.

Quant à Madame Bullot, elle était très contrariée de ces événements. Elle avait cru fermement que tout se passerait on ne peut pas mieux et que sa chère petite amie allait enfin trouver le bonheur mérité.

Le dénouement survenu la troublait. Elle ne comptait pas sur un revirement de Sylviane, à