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Armelle, nous irons peut-être au parc… le temps est si joli.

La jeune fille parut soudain songeuse. Une onde rose colora son visage. Elle se souvenait de l’inconnu.

Ses traits se crispèrent. Aussi bien que cet étranger lui eût paru, il fallait l’éliminer de sa mémoire et si elle le rencontrait de nouveau, lui témoigner du mépris.

Que la vie était compliquée ! elle n’aurait pas mieux demandé que d’être douce et simple, mais il fallait se défendre et lutter. Et pourquoi ? Parce que sa pauvre tante avait souffert, alors que, jeune, elle avait aimé.

Armelle frissonna. Elle évoqua sa souffrance si elle aimait elle-même et que son fiancé l’eût trahie.

Elle chassa cependant ces pensées douloureuses pour s’absorber dans la joie de revoir ses amies le lendemain.

Elle dit à son oncle peu après, quand elle fut seule avec lui :

— Il faudra peut-être que vous m’achetiez un peu de rouge, quand vous sortirez, mon oncle.

— Moi, acheter du rouge ? Tu n’y penses pas, ma petite enfant. On me prendrait pour un vieux fou.

— J’en voudrais cependant poser un peu sur mes joues… je me trouve pâle.

— Tu es rose, au contraire, mais parle de ce fard à ta tante.

— Oh ! mon oncle, elle est si gentille qu’elle me trouve toujours bien, et j’aurais beau lui assurer que je suis laide et que du rouge m’embellirait, elle ne me croirait pas. Ces demoiselles étalent si jolies avec leurs joues bien peintes… cela sert à quelque chose de fréquenter les musées. Elles m’ont confié aussi qu’elle avivaient leurs lèvres. Vous savez tout cela, mon oncle ?