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ÉRASME DOCTEUR EN THÉOLOGIE.

me font souvenir que ma vie qui s’écoule approche de l’hiver et de la froide vieillesse. » Ce fut à Turin, où il arriva à la fin de septembre 1506, qu’Érasme, cédant aux conseils de ses amis, prit le grade de docteur en théologie[1].

De Turin Érasme passa à Bologne où il résida jusqu’à la fin de 1507. « Nulle année de ma vie, écrivait-il plus tard, n’eût été plus maussade pour moi, sans l’intimité de Paul Bombasius, qui me consola[2]. » C’était en effet pour Érasme jouer de malheur que d’arriver à Bologne pour voir l’entrée triomphale de Jules II, vainqueur des Bentivogli, et qui s’avançait par les rues portant une mitre en forme de casque (11 novembre 1506)[3]. Les satiriques allusions qu’il lança contre ce pape montrent combien il fut froissé du spectacle de cette pompe si peu chrétienne. Des mésaventures personnelles vinrent encore aigrir son esprit. Ses compagnons ne cessaient après boire de se quereller et de se battre. On tirait l’épée, puis il fallait d’interminables libations pour ramener une paix incertaine et de courte durée. Érasme quitta le plus vite qu’il put une société qui lui était devenue odieuse. Il n’y eut pas enfin jusqu’à son vêtement qui ne faillit un jour mettre sa vie en danger. D’après un règlement du conseil de la ville, tous les étrangers devaient être visités par un médecin, et ceux qui étaient atteints d’une maladie contagieuse portaient un linge blanc attaché à l’épaule, pour qu’on put les

  1. Le diplôme daté du 4 septembre 1506 est inséré dans les Lettres d’Érasme à Amerbach publiées à Bâle en 1779 (in-12, 125 pages).
  2. Catal. — Bombasius, professeur de langue grecque, devint secrétaire du cardinal Pucci et périt au siége de Rome par le connétable de Bourbon (1529). Il fut en grand commerce de lettres avec Érasme.
  3. Vincent le Mantouan a parlé de cette entrée de Jules II dans le ive chant du poëme intitulé l’Alba. V. Carm. illust. poet. Ital., t. XI, p. 48.