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QU’EST-CE QUE LA RELIGION

Ainsi, les docteurs chrétiens du code n’ont pas eu tort de placer Dieu au sommet du droit criminel, en déclarant le blasphème le plus grand de tous les crimes possibles ; plus tard cette ardeur se refroidit du moins en ce sens, que le blasphème fut désormais puni comme une simple injure contre les adorateurs de Dieu, et non plus contre lui-même. En d’autres termes, le code pénal prenant si vivement le parti de Dieu, ne s’intéressa au fond qu’à l’Homme, dont l’honneur est partout et toujours en rapport direct avec les dieux qu’il vénère. Le résultat était cependant à peu près le même : en Égypte on noya quiconque avait offensé le saint crocodile, en Autriche on brûla celui qui avait parlé mal du Dieu trinitaire. L’État politique chrétien prouve de la sorte que les éternelles flammes de l’Enfer ne sont point une illusion fantastique, et les blasphémateurs qui subirent les tourments diaboliques du droit criminel sous Léopold Ier, empereur d’Autriche, trouvèrent sans doute un quart d’heure long comme l’éternité.