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QU’EST-CE QUE LA RELIGION

composé de toute-puissance, toute-sagesse et d’autres qualités, toutes élevées à la personnalité et condensées dans une personne, met en mouvement mon bras, ma volonté n’a que l’air de le faire : je ne sais pas quel muscle il faut contracter, or ce que je ne sais je ne peux le faire, donc ma volonté n’est point la motrice de mon bras. Cette explication, qui suppose des forces subjectives, personnelles en Dieu pour en déduire les forces également subjectives personnelles en moi, n’explique point l’énigme dont il s’agit. Et pourtant, la nature était l’objet de prédilection que les philosophes étudiaient, chaque fois qu’ils se détournaient avec un noble dégoût du gâchis des matières proprement religieuses. Mais les sciences positives de la nature n’avaient que commencé de naître, des cas exceptionnels attiraient plus que les faits ordinaires de la nature l’attention des observateurs, les critéria manquaient, la critique était encore au berceau. Il en était de même sur le domaine de l’histoire : « Plus on l’étudie, plus on en connaît l’incertitude, » s’écrie Bayle avec tristesse (Crit. gén. 53. Nouv. de la Rép. 185. V) et c’était là encore un résultat de la théologie, qui avait tout fait pour corrompre les annales.


Chapitre XXI.

La Contradiction dans l'Existence de Dieu.


Qu’est-ce qu’il y a de bon, de vraiment salutaire dans la religion ?

Qu’est-ce qu’il y a de mauvais, de vraiment délétère dans la religion ?

Voici la réponse :

Là, où la religion exprime le rapport entre l’essence humaine, elle est bonne et humanitaire.

Là, où la religion exprime le rapport entre l’homme et l’essence humaine changée en un être surnaturel, elle est illogique, menteuse, et porte dans ses flancs le germe de toutes les horreurs qui désolent la société depuis soixante siècles ; là elle est surtout le