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L’ESSENCE DU CHRISTIANISME

Dieu prêche encore tous tes jours la résurrection des morts, il donne de cet article de foi tant de preuves et d’exemples qu’il existe des créatures (X, 432 ; III, 586, 592. —  Augustin, par exemple, Enarr. in Ps. 90. Serm. II, c. 6). » En un mot le mouvement vital de l’univers est pour le vrai croyant une fantasmagorie permanente la sainte mascarade, la comédie divine : « Dieu, s’il le voulait, pourrait très bien nous créer comme il a créé Adam et Ève, sans père ni mère ; il pourrait nous gouverner sans des princes, nous donner de la lumière sans le soleil et sans la lune, nous fournir notre pain sans le travail aux champs, mais il ne le veut pas (XVI, 614). » « Il aurait pu soutenir aisément Noah et toux ses animaux sans aliments pendant toute une année, comme il a soutenu Moïse, Élie et le Christ sans nourriture pendant quarante jours. » Ainsi, ce que ce Dieu thaumaturge a fait une ou plusieurs fois, il peut le faire tant qu’il lui plaira. Un miracle n’est qu’un exemple isolé, une demonstratio ad oculos… « Le passage d’Israël à travers la mer rouge n’est qu’un exemple, pour nous démontrer clairement ce qui pourrait arriver à nous (III, 596). » « La foi change l’eau en pierre, le feu en eau et l’eau en feu (III, 564). » Le miracle est le vrai terme technique de la foi religieuse, et sa puissance est celle de l’imagination.

Sans doute, l’activité miraculeuse poursuit un but ; la résurrection de Lazare était motivée par le désir de ses parents. Et c’est ici que nous voyons nettement l’origine humaine du miracle ; Lazare est ressuscité pour l’honneur de Dieu, il est vrai, afin que le Fils divin en soit honoré, mais n’oublions pas que tes sœurs du mort out envoyé chercher le Seigneur : Regarde, celui que tu aimes, est tombé malade, et les larmes que le Christ verse à cette occasion, sont encore une preuve du but humain. Le sens est : une puissance qui est capable de ressusciter un cadavre, peut réaliser tout désir humain : « Le monde entier ne saurait faire un pareil miracle, mais le Seigneur l’a fait sans la moindre difficulté : que cela nous soit donc un signe de notre résurrection future ; il la fera infailliblement au jour dernier (XVI, 518). » Voilà par conséquent Dieu un sauveur de l’homme, c’est-à-dire un être essentiellement humain, et toujours prêt à répondre aux désirs de l’homme. En d’autres termes, la signification positive du miracle est l’identité de Dieu et de l’homme.