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L’ESSENCE DU CHRISTIANISME

aquas, ambulavit homo supra aquas (Ambrosius, Epist. X, 81 edit. Basil. Amerbach. 1492 et 1516). » Et Bernard « Mira sunt, fratres, quæ de isto sacramento dicuntur… Hæc sunt quæ fidem necessario exigunt, rationem omnino non admittunt (de cœna Dom.). » « Quid ergo quæris hic naturæ ordinem in Christi corpore, cum præter naturam sit ipse partus ex virgine ? » dit Pierre Lombard (IV, dist. 1O. c. 2). « Laus fidei est credere quod est supra rationem, ubi homo abnegat intellectum et omnes sensus (Add. Henric. de Vurimaria, ibid., dist. 12, c. 5). » « Tout article de notre foi est ridicule et absurde aux yeux de la raison… Oui, nous sommes chrétiens, et devant le monde nous sommes de grands fous, qui croyons que Marie, une vierge pure et Immaculée, puisse être la véritable mère d’un enfant. Cela contredit non-seulement notre raison, mais aussi la création naturelle, car Dieu avait à Ève et Adam : Soyez féconds, et multipliez-vous, dit Moïse ; mais il ne faut jamais demander si une chose est possible ou si elle ne l’est pas ; Dieu l’a dit, cela suffit, il la rendra possible, voilà tout (XVI, 570). » « Qu’y a-t-il de plus merveilleux qu’un Dieu qui est a ta fois Dieu et homme ? Il est le fils de Dieu et de Marie, et en même temps Dieu ; il est homme, il est à la fois créature et créateur: personne ne le comprendra jamais (VII, 128). » Pour sortir de cette difficulté Luther en appelle hardiment à la puissance miraculeuse de ce Dieu, c’est-à-dire, il explique le miracle par le miracle. Le protestantisme lui aussi croit à la perpétuité non-interrompue de cette puissance, à cette restriction près, dit-il toutefois, qu’elle n’a plus besoin de se manifester aujourd’hui par des signes matériels dans un but dogmatique : « Car enfin, l’Évangile du Dieu trinitaire a été répandu par les Apôtres et publié au monde, il n’est donc plus nécessaire de faire des miracles comme au temps des Apôtres ; mais si le besoin se faisait sentir, si l’Évangile était mis en danger, alors nous devrions prendre en main sa sainte cause et faire des signes (XIII, 642). » Le miracle est aux yeux de la religion identique avec la nature, la confusion est complète : « Dieu a dit au commencement : Que la terre fasse naître de l’herbe et des plantes, etc. Cette parole divine, toujours la même, produit encore aujourd’hui les cerises du rameau sec et ligneux de l’arbre, cette même parole fait naître le cerisier d’un peut noyau. C’est la toute-puissance divine qui change tes œufs en poulets et en oies.