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est foible et tremblant, ma main est sûre, excepté par le grand chaud ou le grand froid, alors je tremble en commençant à écrire.

Mais malgré ces crispations,
Si vous étiez à table auprès de la malade,
Elle vous verseroit encor bonne rasade
De ce jus qui bannit le chagrin et l’humeur.
Tout mon nectar, à moi, c’est la douce liqueur
Qu’on recueille en un coin de la riante Asie.
De notre globe hélas ! c’est la seule partie,
Oui, la seule qu’on appela
Du nom d’heureuse ; à l’Arabie
Le café vaut cet honneur là.
Ne m’en privez pas, je vous prie
Il réchauffe l’esprit, ranime notre cœur,
Fait croire un instant au bonheur,
C’est l’antidote enfin de ma mélancolie.

Connoissant à présent l’état de mes nerfs, vous vous doutez bien, monsieur, que je suis vive et très-impatiente : je serois même colère, je crois, si j’avois la force de l’être. Je suis paresseuse de corps, je prends peu d’exercice, mais mon ame trotte toujours dans sa chétive demeure ; aussi l’ai-je comparée depuis longtemps à un revenant dans une vieille masure. Voyez donc ce que vous pouvez faire en faveur de ma vieillesse. Vous avez empêché ma fille de mourir, je ne cesserai de vous en remercier : mais moi ! moi ! ce seroit presqu’une résurrection, car je suis à demi-morte. En attendant ce nouveau miracle de votre façon, je vous renouvelle, monsieur, toute ma reconnoissance et tous les autres sentimens avec, etc.