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FABLE II.

LA CHATTE VOYAGEUSE.


Jeune chatte blanche et jolie,
Dédaignoit douceurs, complimens
De tout chat qui vouloit lui tenir compagnie ;
Toujours sa griffe en l’air repoussoit les amans,
Et les forçoit bientôt à quitter la partie ;
Même dans ces débats chastes et vertueux,
Plus d’un minet perdit les yeux.
La foule des galans enfin me désespère,
Dit-elle un matin à son père ;
J’ai fait vœu de virginité,
Et pour mieux l’accomplir, vœu de pélerinage ;
Accordez-moi la liberté
De commencer mon grand voyage :
Je prîrai pour votre santé,
Et vous me reverrez heureuse autant que sage.
Le vieux matou veut arrêter ses pas :
Partout, lui disoit-il, vous trouverez des chats
Qui, comme ici, viendront vous rendre hommage ;
Vous n’y pensez pas : à votre âge,
Voyager seule et loin, caprice extravagant !
Leste et vive, elle échappe à sa juste colère,
Et la voilà sur la gouttière.
Après avoir rapidement
Franchi montagne, bois et plaine,
Sur le plus vert gazon, voulant reprendre haleine,
Elle s’endort profondément ;
Et que voit-elle en s’éveillant ?
Le mieux fourré des chats, un Angora charmant.