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FABLE XCVIII.

LE TIGRE ET LE CHAT.


Un tigre à déjeuner mangeoit un mouton gras ;
Un beau chat le regardoit faire,
Il étoit de sa loge éloigné de vingt pas.
Lorsque le sire eut fini son repas,
Il examine, il considère
Et la forme et les traits de ce preneur de rats :
Mais, lui dit-il, à ta manière,
À ton air, à ta barbe, à tes regards perçans,
Je crois, ma foi, que nous sommes parens.
Tu me fais souvenir de ma progéniture,
Surtout du plus joli des princes mes enfans,
Dont la perte toujours excite mon murmure
Contre les dieux et la nature.
Viens, mon cher, viens vivre avec moi
En faveur de la ressemblance ;
Quand nous aurons fait connoissance,
Tu seras plus heureux qu’un roi.
Tu vois comme on me sert, quelle est mon abondance :
Avec toi chaque jour je la partagerai,
Et même je t’adopterai
Pour succéder à mon empire
Où bientôt je retournerai.
C’est trop d’honneur, je vous rends grǎce, sire,
Répond le chat, je suis indigne de vos soins,
De votre parenté, de votre bonne chère :
Ma vie est simple et j’ai peu de besoins.
D’ailleurs, vous vous trompez ; j’entends dire à ma mère