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faisait froid ; c’était en automne, et sans doute le capitaine Fraser songeait que vers cette époque il chassait autrefois le chevreuil dans ses rudes et chères montagnes d’Écosse. Autour de lui circulaient en bandes joyeuses les voyageurs, qui s’en allaient passer l’hiver à trapper et courir les bois et les solitudes de l’Ouest. Ce soir-là même, les bateaux devaient partir pour hiverner à Montréal : les anciens avaient pronostiqué une saison longue et giboyeuse, et chacun allait retenir son passage.

Certes, il faisait bon de voir tous ces braves gens partir ainsi le cœur gai, le sourire aux lèvres ; et tout en se disant cela, mon oncle murmurait :

— Ils ont bien raison d’être joyeux, ma foi ! le travail les attend là-bas, tandis que voilà la morte saison qui arrive pour moi.

Il en était là de son monologue, lorsqu’un voyageur, se détachant du groupe qui flânait au coin de la rue, s’en vint timidement vers mon oncle.