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Saint-Laurent sur le bout du doigt. Il savait où gisaient le moindre récif, le plus petit banc de sable, les cayes les plus inoffensives, et comme cette réputation-là n’était pas volée, elle s’était répandue parmi les Bostonnais, qui virent dans cette capture une chance providentielle.

À bord, on le nourrit bien, on le régala même ; il avait un beau cadre pour dormir : bref, on le traitait comme le meilleur des officiers ; mais toutes ces attentions passaient sur la rude écorce de Paradis, sans le faire fléchir. Pour âme au monde il n’aurait voulu toucher à la barre du gouvernail ; car avant d’être marin, il était Canadien-français.

Tout avait été mis en œuvre pour venir à bout de cette volonté de fer, sans pouvoir la dompter, et tout en discutant, à force de suivre la vague, on se trouvait déjà par le travers de l’Ile aux-Œufs.

On était alors au 22 août 1711. L’Edgar, immobile sur le flot, semblait dormir, repu de toute cette ferraille qu’il s’en